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Ecole du Yin-Yang et des cinq phases (yinyang wuxing jia, 陰陽五行家)

 

Notamment représentée par les travaux du penseur Zou Yan (IIIe siècle av. J.-C.), l’école du yinyang et des cinq phases est une systématisation (vers le IIIe siècle av. J.-C.) de principes qui sont bien plus anciens. Notamment : le qi (), le yin/yang (陰陽) et les cinq phases (wu xing 五行), qui forment par leur interaction une vision cosmologique à part entière servant de socle commun à l’ensemble de la pensée chinoise ancienne et classique.

Comme ces termes traversent toute l’histoire de la pensée chinoise, ils méritent d’être étudiés à chaque fois dans leur contexte. Mais on peut au moins en donner une définition de départ (aussi approximative et réductrice soit-elle). 

  • Le qi () : en synthèse

Généralement traduit par souffle ou énergie (le caractère actuellement en usage évoque la vapeur – –  qui émane du riz en train de cuire - 米), le qi est une force vitale qui anime et structure toute chose. Selon la formule d’Anne Cheng, le qi est « un principe de réalité unique qui donne forme à toute chose et à tout être dans l'univers » (in Histoire de la pensée chinoise, Seuil, 1997, p. 252).

Mais il faut préciser que le qi n’existe pas en dehors des êtres qu’il anime. Il circule en toute chose sans qu’il soit possible de le saisir en dehors des choses. Comme le souligne Isabelle Robinet, « Ce n’est pas une substance qui aurait une existence repérable, en dehors des formes qu’elle prend et de leurs transformations » (Histoire du taoïsme des origines au XIVe siècle, éditions du Cerf, 1991, p. 11.) 

De cette circulation du qi dépend l’évolution des êtres : « Tout naît, tout disparaît en raison des divers états de ce Souffle et, en conséquence, tout n’est que mutations et permutations toujours renouvelées d’une forme dans une autre » (I. Robinet, La pensée chinoise, dir. Sylvain Auroux, Puf, 2017, p. 122). 

Mais le rythme du qi ne se comprend pas sans l’alternance Yin/Yang.

  • Yin/Yang (陰陽)

Le couple Yin/Yang désigne pour sa part deux principes complémentaires qui constituent le rythme fondamental du qi. Ce ne sont pas des réalités opposées et figées (à l’image de la caricature souvent donnée). Yin et Yang, tout en renvoyant à des tendances contraires (le premier qualifiant ce qui penche vers le repos et le second ce qui s’oriente vers le mouvement), sont en constante interaction. A chaque fois, le déclin de l’un implique le développement de l’autre, cela dans une alternance sans cesse renouvelée.   

Comme l’explique Anne Cheng, « Le rythme binaire Yin/Yang est le rythme fondamental qui anime le principe vital : le qi qui se meut, s’ouvre, s’étend est Yang ; quand il revient à la quiétude et se replie sur lui-même, il est Yin. Lorsqu’un être advient à l’existence, son qi se meut vers le dehors dans sa phase Yang, puis se stabilise dans la phase de recueillement Yin pour se fixer dans une forme durable. En d’autres termes, Yin et Yang ne désignent pas deux forces opposées qui s’appliqueraient au qi conçu comme matière inerte, l’une la mettant en mouvement et l’autre au repos, ils sont deux phases du qi constamment en circulation, en expansion/contraction. » (Anne Cheng, Histoire de la pensée chinoise, Seuil, 1997, pp. 254-255). 

Notons qu’initialement, le Yang désignait le versant lumineux d’une montagne et le Yin était rattaché à ce qui est sombre et humide (et donc au versant sombre d’une montagne). Ensuite, les deux termes en sont venus à désigner des catégories complémentaires permettant de décrire la dualité en toute chose. Le Yin serait la qualité de ce qui tend vers le lunaire, l’obscur, l’intériorité, la souplesse, le nord, etc., alors que le Yang exprimerait par contraste ce qui tend vers l’ensoleillement, la luminosité, l’extériorité, etc.

Mais il faut se garder d'interpréter cela d'une façon trop rigide. D’une part, toute réalité possède en elle l’interaction Yin/Yang et les deux catégories sont interdépendantes. Enfin, les deux ne sont en aucun cas des réalités figées (il ne s'agit pas d'une nature yin ou d'une nature yang dans les choses). Ce sont des tendances contraires, mais complémentaires, au cœur de la dynamique de la nature. Lorsqu'elles atteignent leur plénitude, elles se renversent (la pleine expression du Yang l'amène à devenir Yin et la pleine expression du Yin l'amène à se faire Yang).

 

  • Les cinq phases, wu xing 五行 (bois, feu, terre, métal et eau) :

Il ne s’agit pas tant d’éléments figés (comparables au quatre éléments de la philosophie d’Empédocle) plutôt que de phases. En d’autres termes, ce sont des processus à l’oeuvre dans toute réalité, des dynamiques qui reflètent les différentes orientations du cycle vital. Comme le dit Léon Vandermeersch, les wu xing « ne sont pas des substances mais les formes fondamentales de la dynamique des mouvements et changements affectant incessamment tous les êtres de l’univers. » (Les deux raisons de la pensée chinoise, Gallimard, 2013, p. 111). 

Autour de ces cinq phases, combinées à l'alternance Yin/Yang, s'élaborent alors des systèmes de correspondances et de repères visant à comprendre les influences et résonances réciproques entre toutes les choses et les êtres (sur la page suivante, vous pouvez trouver un tableau non exhaustif de certaines de ces correspondances).

Ce système conceptuel (qi, Yin/Yang, wu xing) aboutit donc à une vision cosmologique complexe, résolument orientée vers la mise en valeur de l'interdépendance entre tous les éléments. Plus précisément, cette vision s'articule autour d'une intuition centrale, celle d'une "résonance mutuelle" universelle (Ganying 感應), à savoir l'idée que chaque événement, phénomène ou action déclenche une impulsion, un stimulus qui reçoit en retour une réponse sur les plans qui correspondent à leur catégorie d'appartenance.  

  

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